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Contexte et enjeux pour le notariat
Depuis le 1er mai 2025, les apostilles sur les actes publics français destinés à l’étranger ne sont plus délivrées par les cours d’appel, mais par le notariat, dans le cadre d’une délégation de service public de l’État. De même, depuis le 1er septembre 2025, les notaires assurent également la légalisation des documents pour les pays non signataires de la Convention de La Haye. Cette réforme, initialement prévue en 2023 mais plusieurs fois repoussée, marque une évolution majeure du périmètre d’intervention des notaires. Elle s’inscrit dans un mouvement plus large d’élargissement des compétences des notaires, notamment en droit des affaires et des sociétés, rôle dont l’importance a été soulignée dans la profession ces dernières années.
Pourquoi cette réforme ? D’une part, pour moderniser et simplifier la procédure : la délivrance des apostilles et légalisations est désormais en grande partie dématérialisée via une plateforme en ligne, accompagnée de la création d’une Base de données nationale des signatures publiques (permettant de vérifier les signatures des autorités émettrices). D’autre part, le transfert au notariat vise à désengorger les services de l’État (Ministère des Affaires étrangères et parquets généraux des cours d’appel) et à s’appuyer sur le maillage territorial et l’expertise des notaires en matière d’authentification. Pour les notaires, c’est un nouveau défi mais aussi une marque de confiance de l’État envers la profession.
Les enjeux pour les études notariales sont donc multiples : il s’agit de s’approprier de nouveaux outils numériques, de former les collaborateurs aux nouvelles procédures, et d’adapter l’organisation des études pour accueillir des demandes d’apostille de la part des usagers. Au-delà de l’aspect technique, cette réforme positionne davantage le notariat comme tiers de confiance central dans la circulation internationale des actes. Un décryptage pratique de la réforme s’impose afin d’identifier les changements concrets par rapport à l’ancien système, les impacts opérationnels au quotidien, les points de vigilance, ainsi que les opportunités qui en découlent en termes de service aux clients et de valorisation du rôle du notaire.
Avant / après la réforme de 2025 sur les apostilles
Pour bien mesurer l’ampleur du changement, voici un tableau comparatif des principales caractéristiques avant et après la réforme de 2025 :
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Aspect |
Avant (jusqu’au 30 avril 2025) |
Après (depuis le 1er mai 2025) |
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Autorité compétente pour apostille |
Parquets généraux des cours d’appel (33 juridictions compétentes). |
Notaires de France (via 15 centres régionaux ou inter‐départementaux désignés). |
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Autorité compétente pour légalisation |
Bureau des légalisations du Ministère de l’Europe et Affaires étrangères (+ consulats à l’étranger). |
Notaires de France (même 15 centres) – depuis le 1er septembre 2025. Jusqu’à cette date : ministère/consulats. |
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Support et format |
Cachet physique apposé sur l’original ou copie certifiée du document. Processus papier majoritaire. |
e-Apostille / e-Légalisation : certificat numérique sécurisé, enregistré dans un registre national. (En cas d’impossibilité technique, une apostille papier peut encore être délivrée.) |
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Procédure de demande |
Selon les cas : déplacement au greffe de la cour d’appel, ou envoi postal au MAE. Pas de plateforme unique nationale. |
Demande en ligne sur la plateforme dédiée (apostille.notaires.fr) pour la plupart des cas. Possibilité alternative : dépôt physique ou par courrier au guichet d’un des 15 centres (mais dossier à créer en ligne préalablement). |
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Délais indicatifs |
Variables selon les juridictions (quelques jours à quelques semaines). Pas d’engagement de délai uniformisé. |
Délai cible de 3 jours ouvrés par voie électronique (délai réglementaire). Service express possible sous 24h (avec surcoût). NB : en pratique, des retards importants ont été constatés au démarrage. |
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Suivi et registre |
Registres locaux (signatures déposées auprès de chaque cour d’appel ou du ministère). Pas de suivi centralisé en ligne pour l’usager. |
Registre national électronique tenu par le Conseil supérieur du notariat, recensant toutes les apostilles/légalisations délivrées. Vérification possible via un code unique de l’e-apostille. |
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Coût pour l’usager |
Apostille gratuite (en France métropolitaine) ; légalisation gratuite ou frais modestes (selon timbres fiscaux en consulats). |
Redevance forfaitaire perçue par le notariat : ex. 10 € par document (personne physique, jusqu’à 3 documents) ; 20 € par document pour une personne morale. Tarifs dégressifs au-delà de 3 documents et majoration en cas de demande express2. |
Lecture du tableau : Désormais, le notariat assure l’intégralité du processus, en privilégiant une approche dématérialisée et centralisée. L’usager bénéficie d’un point d’entrée unique en ligne et d’un registre national garantissant la traçabilité. En contrepartie, une redevance est due pour ces formalités autrefois souvent gratuites, et le déploiement du nouveau système s’est accompagné d’une phase transitoire avec quelques ralentissements.
Impacts concrets pour les études notariales
- Traitement des demandes clients
Les demandes d’apostille restent fréquentes pour les actes à destination de l’étranger. L’orientation vers la bonne Cour devient essentielle. - Gestion documentaire
L’apostille se faisant désormais sur un document numérique, il faut veiller à la conformité de la version transmise (PDF signé, qualité, cachets…). - Plateforme nationale
Les apostilles sont centralisées et consultables via une base officielle : cela facilite la traçabilité, mais demande un minimum de prise en main.
Points de vigilance
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Risques / Irritants |
Réflexes utiles |
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Envoi d’un document non conforme (scan, format) |
Toujours vérifier la qualité du PDF transmis |
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Choix de mauvaise juridiction pour l’apostille |
Se référer au ressort de la Cour d’appel compétente |
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Refus faute de signature vérifiable |
Utiliser un certificat conforme à la base nationale |
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Client mal informé sur les délais |
Anticiper et expliquer clairement les nouveaux circuits |
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Confusion papier / numérique |
Éviter les doublons de circuits, former les équipes |
Opportunités pour les notaires
La réforme de l’apostille n’est pas seulement un changement procédural : elle offre aussi de nouvelles occasions de valoriser l’accompagnement notarial.
- Renforcer le rôle de tiers de confiance
En sécurisant les actes destinés à l’international, le notaire joue un rôle clé dans un contexte de complexification des échanges. Grâce à sa signature qualifiée et sa capacité à garantir l’authenticité des documents, il s’impose comme l’interlocuteur naturel pour les clients confrontés à ces enjeux. - Proposer une offre complète, sécurisée et digitale
Le passage à la e-apostille permet de construire une offre de services élargie : gestion de l’apostille, vérification de conformité, accompagnement à la traduction assermentée, voire préparation d’un dossier complet à destination d’un consulat ou d’une administration étrangère. Les clients attendent des solutions simples et fiables : le notaire peut répondre à ce besoin. - Moderniser la relation client
En intégrant pleinement les outils numériques dans le traitement des demandes, l’étude notaire renforce son image de structure moderne, réactive et en phase avec les attentes des entreprises comme des particuliers à l’international.