Apport en jouissance : tout comprendre avec LegalVision

Apport en jouissance : une entreprise doit nécessairement avoir un capital social. Il s’agit d’une des conditions de validité du contrat de société. Le capital social est composé des différents apports que les associés (ou actionnaires) ont réalisé. Ces apports peuvent prendre la forme soit d’un apport en numéraire, en nature, ou enfin en industrie. Toutefois, il convient de noter que l’apport en industrie ne concourt pas à la formation du capital.

Dans ce nouvel article, Legalvision vous présente un type particulier d’apports en nature. Il s’agit de l’apport en jouissance.

Sommaire 

Qu’est ce qu’un apport en jouissance ?
Apport en jouissance : évaluation 
Apport en jouissance : avantages et inconvénients
Fiscalité de l’apport en jouissance

Qu’est-ce qu’un apport en jouissance ?

Le bien apporté peut être une somme d’argent : on parle dans ce cas d’apport en numéraire. Toutefois, l‘apport en nature porte lui sur un bien autre qu’une somme d’argent. Il s’agit alors d’un bien meuble ou d’un bien immeuble. Dans le cas de biens fongibles, c’est-à-dire des biens qui se périment, la société deviendra propriétaire des biens. Cependant, elle devra restituer à l’apporteur une valeur identique au bien ayant été apporté.

L’apport en nature peut être effectué de trois manières :

  • en usufruit,
  • en pleine propriété,
  • ou enfin en jouissance.

Définition d’un apport en jouissance

L’apport en jouissance se définit comme un type d’apport où le bien est mis à disposition à la société pendant une durée limitée. C’est donc la jouissance du bien qui est accordée à la société. Cette durée peut être déterminée de façon préalable et insérée dans les statuts juridiques. Par ailleurs, l’apporteur reste propriétaire du bien qu’il transfère à la société. Réciproquement, la société ne sera pas propriétaire du bien en question. L’apporteur supportera alors en pratique lui-même les risques liés à la propriété.

En contrepartie de cet apport, l’apporteur aura la qualité d’associé ou d’actionnaire (le terme varie selon la forme juridique de la société). L’apport en jouissance entraînera alors une augmentation de capital social. En conséquence, l’apporteur en jouissance sera donc soumis aux mêmes obligations, et titulaire des mêmes droits qu’un associé ou actionnaire ayant apporté un bien en numéraire (somme d’argent).

L’apport en jouissance pourrait se rapprocher d’un contrat de location. L’apporteur reste propriétaire des biens, et en contrepartie reçoit des parts ou dividendes (contrairement au loyer pour un contrat de location).

A noter : 

Il est parfois possible que les statuts prévoient des règles spécifiques applicables à l’actionnaire ou l’associé ayant apporté un bien en jouissance. Dans ce cas, il est obligatoire que les statuts prévoient ces règles dérogatoires. Par exemple, le titre de jouissance peut apporter un droit de vote limité au sein de l’entreprise.

Distinction de l’apport en jouissance des autres apports en nature

Apport en pleine propriété

Cet apport correspond au cas d’un transfert de la propriété d’un bien à la société. La société acquiert alors la pleine propriété de ce bien à la date de l’immatriculation de la société au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS). Dans le cas où le bien est apporté après constitution de la société, la propriété est transmise dès l’échange des consentements des associés.
Lorsque l’apport est effectué en pleine propriété, tous les risques inhérents à la propriété de ces biens sont alors transférés à la société. En outre, en cas de dissolution de la société, l’apporteur pourra reprendre la propriété de son bien, sauf dispositions contraires dans les statuts.

Apport en usufruit

C’est un peu la situation intermédiaire entre l’apport en pleine propriété et l’apport en jouissance. La société peut disposer du bien apporté librement, et en percevoir les bénéfices liés à son exploitation. L’apporteur reste alors le propriétaire du bien.

Apport en nu propriété 

Dans ce cas, c’est la société qui devient propriétaire du bien. Cependant, l’apporteur va conserver l’usage et les fruits liés à l’exploitation du bien apporté. Donc, la société n’aura pas le droit d’utiliser ces biens ni de percevoir les bénéfices qu’ils procurent.

Pour plus d’informations, nous vous invitons à consulter notre article sur les types d’apports en SAS.

dans les SAS.

Réalisation de l’apport en jouissance

Les conditions liées à la réalisation de l’apport en jouissance doivent obligatoirement être mentionnées dans des statuts ou dans une convention d’apport qui sera annexée aux statuts. En outre, il est nécessaire que la société puisse jouir paisiblement du bien pendant la période pour laquelle il lui est mis à disposition.

Certaines informations doivent figurer dans les statuts ou dans la convention d’apport :

  • l’identité de l’associé (ou actionnaire) réalisant l’apport ;
  • les caractéristiques du bien ;
  • la durée de la jouissance ;
  • les droits obtenus en contrepartie de l’apport.

A noter: 

Les formalités de publicité normalement obligatoires en cas de modification des statuts ne sont pas nécessaires en cas d’apport en jouissance. Toutefois, il reste vivement conseillé de procéder à la publication dans un journal d’annonces légales.

Apport en jouissance : évaluation

Pour sécuriser l’apport en nature, le législateur a soumis l’évaluation de l’apport en jouissance à des règles particulières.

Ainsi, il convient de nommer un commissaire aux apports qui va réaliser une évaluation de la valeur de l’apport en jouissance.

Cette évaluation peut être aussi faite :

  • soit lors de la constitution de la société ;
  • soit au cours de la vie de la société. Il sera dans ce cas nécessaire de modifier les statuts juridiques de la société pour renseigner le type d’apport effectué ainsi que la valeur de celui-ci.

L’évaluation des apports en jouissance par un commissaire aux apports dépend de la forme juridique de la société. Ainsi, concernant les Sociétés Anonymes (SA), il est obligatoire de nommer un commissaire aux apports pour évaluer l’apport en jouissance qui a été effectué. Toutefois, lorsque la société est une SARL ou une SAS, il est possible de se soustraire à l’obligation de nommer un commissaire aux apports. Dans ce cas, deux conditions sont nécessaires :

  • le bien apporté doit avoir une valeur inférieure à 30 000 euros,
  • et il doit représenter moins de la moitié du capital social de l’entreprise.

Enfin, il convient de noter que lorsqu’il n’y a pas eu de commissaire aux apports ou lorsque la valeur retenue est différente de celle proposée par le commissaire aux apports, les associés sont solidairement responsables pendant 5 ans, à l’égard des tiers, de la valeur attribuée aux apports en nature lors de la constitution de la société.

A noter:

Pour les autres formes de sociétés, en principe, il n’y a pas d’obligation de désigner un commissaire aux apports.

Apport en jouissance : avantages et inconvénients

 Avantages de l’apport en jouissance

Apporter un bien en jouissance présente plusieurs avantages significatifs. Cela permet d’abord de récupérer le bien en cas de liquidation de la société. En effet, comme il n’y a pas de transmission de propriété du bien à la société, le bien est remis à l’associé ou l’actionnaire concerné. En revanche, lorsque l’apport est effectué en pleine propriété, l’apporteur risque de ne pas pouvoir reprendre son bien en nature lors de la dissolution de la société, par exemple si le bien a été aliéné par la personne morale.

Enfin, en cas de conflit entre les associés ou actionnaires conduisant à la sortie de l’apporteur en jouissance, celui-ci conservera son bien.

Inconvénients de l’apport en jouissance

Le principal inconvénient est l’impossibilité pour la société de céder le bien ou de le mettre en garantie. 

Fiscalité de l’apport en jouissance

Lorsque l’apport est effectué par une personne physique, il n’est pas possible de bénéficier de la réduction d’impôt sur le revenu en cas d’apport en jouissance . En effet, celle-ci ne concerne que les apports en numéraire.

Par contre, dans le cas où l’apport est effectué par une société soumise à l’impôt sur les sociétés (IS), cet apport est exonéré d’impôt.

Sources 


Articles:

  • L. 223-9 du Code de commerce relatif à l’apport en nature dans les SARL ;
  • 1843-3 du Code Civil relatif aux apports.

2 commentaires

  1. Bonjour,

    merci pour cet article, les actions reçues en contre partie de l’apport en jouissance durent elles autant que l’apport ?
    merci

    1. Bonjour,

      Lorsque vous apportez la jouissance d’un bien à une société en échange d’actions, la durée de votre apport et la durée de détention des actions peuvent être différentes.

      En général, l’apport en jouissance est conclu pour une durée déterminée, qui peut être fixée librement par les parties. Cette durée peut être stipulée dans le contrat d’apport ou dans les statuts de la société.

      Quant aux actions reçues en contrepartie de l’apport en jouissance, leur durée de détention dépend des règles qui s’appliquent à la société en question. En général, les actions ont une durée de détention indéterminée, c’est-à-dire qu’elles peuvent être détenues aussi longtemps que l’associé le souhaite, sauf disposition contraire dans les statuts de la société.

      Cependant, il est possible que les statuts de la société prévoient des règles spécifiques pour les actions issues d’un apport en jouissance. Par exemple, les statuts peuvent prévoir une durée minimale de détention des actions, ou encore des règles spécifiques pour la cession des actions apportées en jouissance.

      Il est donc important de vérifier les termes du contrat d’apport et des statuts de la société pour connaître les règles applicables à votre situation spécifique. Si vous avez des doutes ou des questions, n’hésitez pas à vous faire accompagner par un avocat spécialisé en droit des sociétés.

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